31 décembre, 22h00 : dernier briefing avant l'action. Tobias fait un petit speech bien senti sur la sobriété énergétique, la convergence des luttes, et sur ces salauds de bourgeois nantais qui vont s'en prendre plein la gueule. Les 20 antifas du groupe "Extinction Des Feux" enfilent leur cagoule noire, leur casque de moto, leur sac à dos rempli de matériel, et partent vers leur destination.
31 décembre, 23h00 : chacun des 10 binômes est à son poste, embusqué à environ 500 mètres de son pylône haute-tension respectif. La charge de plastic a été positionnée sur le pylône, le détonateur branché sur son récepteur talkie-walkie numérique. En pleine campagne, de nuit, l'opération était un jeu d'enfant.
1er janvier 00h00 : chacun des 10 responsables de binômes appuie sur son émetteur talkie. Les 10 pylônes des 10 lignes haute tension s'effondrent en même temps. La ville de Nantes est instantanément plongée dans un noir total.
En plein réveillon, les fêtards cherchent fébrilement leur téléphone portable pour aller aux renseignements : toutes les antennes 4G, tous les concentrateurs France Telecom se sont éteints, plus aucun signal. On allume la télé : brouillard. La radio FM : bruit blanc. Début d'inquiétude. Les gens sortent dans la rue : lampadaires et feux rouges sont éteints. "Il doit y avoir une panne d'électricité dans le quartier". "Ah, ils ont bien choisi leur jour ces idiots, bravo Macron !". Les gens partent se coucher.
1er janvier 01h00 : via le personnel de permanence, l'alerte remonte la voie hiérarchique à la Gendarmerie et chez les pompiers. Aucun moyen de communiquer avec les permanences d'Enedis, EDF et RTE : téléphone, mails, rien ne passe.
1er janvier 01h00 : la permanence locale de RTE a vu en direct sur les consoles de supervision la cascade d'incidents. Aucun moyen d'escalade : le "patron" est injoignable, comme la police et les pompiers. Après 1 heure d'hésitation, la petite équipe de permanence décide d'envoyer 2 des techniciens voir sur place le pylône B712.
1er janvier 01h25 : la Kangoo des 2 techniciens arrive sur zone. Ils s'approchent du pylône, et s'effondrent : avec le silencieux, les 2 coups de feu n'ont fait aucun bruit. Le binôme qui était en embuscade au B712 prévient les autres groupes avec son talkie longue portée, tous quittent immédiatement leur zone respective.
1er janvier 05h00 : les deux gendarmes partis en éclaireurs chez RTE reviennent à la Gendarmerie rendre compte. Un peloton de gendarmerie est dépêché chez RTE, et 10 groupes formés de gendarmes et de techniciens sont constitués pour aller constater les faits sur place. Les 2 cadavres sont découverts à côté du pylône. Des postes armés de surveillance sont mis en place.
Les pylônes sont toujours à terre. Nantes est toujours dans le noir. La ville dort.
1er janvier 08h00 : pendant une demi-heure, sirènes hurlantes, 10 motos sillonnent les quartiers chauds de Nantes : Le Breil, Bellevue, Malakoff, Dervallières, etc. Et jettent des tracts par poignées :
Black-out - Black-out - Black-out
Plus de caméras de surveillance dans les rues, plus de signal d'alarme dans les magasins, pas de téléphones pour appeler la Police !
Enfilez une cagoule noire sur la tête, et à vous la Vengeance !
C'est la semaine des Soldes à 100% ! Profitez-en ! Vous n'avez qu'à vous servir !
Inch'Allah !
Signé : Comité Extinction Des Feux
1er janvier 09h00 : les premiers petits groupes de pillards cagoulés commencent à démolir à coup de masse des vitrines de bijouteries, rue Crébillon.
1er janvier 10h00 : des groupes de 20 à 30 pillards, arrivés en cyclo, attaquent plusieurs hypermarchés de la périphérie.
1er janvier fin de matinée : par bouche à oreille, les Nantais commencent à prendre conscience de ce qui se passe : le black-out général, et les scènes de pillage. Début de panique, de plus en plus de gens entassent ce qu'ils peuvent dans leur voiture et quittent la ville pour aller se réfugier, qui dans sa résidence secondaire, qui auprès de la famille à la campagne.
1er janvier après-midi : la Gendarmerie constate son impuissance face aux pillards, maintenant par centaines, qui s'enfuient à son arrivée pour se rabattre sur un autre secteur, comme une nuée d'étourneaux. Des bandes plus organisées déménagent littéralement des boutiques entières avec des camions.
A Malakoff, l'usine de traitement de l'eau de Nantes Métropole est à l'arrêt : il n'y a plus d'eau courante depuis des heures. L'alimentation en gaz de ville est également stoppée. Dehors, la température ne dépasse pas 4°.
1er janvier 17h00 : avec l'aide de la Gendarmerie, qui est aller réquisitionner directement chez eux responsables, techniciens, ouvriers et matériel, RTE a réussi à constituer 2 équipes. Les travaux de réparation des pylônes commencent, sous garde armée.
Nuit du 1er au 2 janvier : toute la nuit, le pillage des supermarchés, boutiques, entrepôts bat son plein.
Nuit du 1er au 2 janvier : le flux de réfugiés augmente sans cesse. Les petites communes avoisinantes, rapidement submergées, redirigent vers Saint Nazaire, Chateaubriand, Angers, La Roche-sur-Yon ou Cholet. Des maisons de retraite, des EHPAD organisent des navettes pour évacuer leurs résidents. Les mairies ouvrent des gymnases pour accueillir les réfugiés. Au matin du 2 janvier, environ 30% de la population a quitté la ville.
2 janvier 04h20 : Le pylône B712 est remonté, la liaison n°3 Cheviré-Lion d'Or est remise en service. Lampadaires et feux se rallument dans les quartiers Bouffay et Cathédrale.
2 janvier 04h25 : 5 km plus loin, un nouveau pylône de la ligne n°3 s'effondre. Nantes replonge dans le noir total. La Gendarmerie lance des escadrons d'inspection, remontant toutes les lignes sur 20 km. 9 autres charges sont découvertes. Avant même que les artificiers aient pu y toucher, elles explosent toutes.
2 janvier matin : les pillards, qui sont maintenant plusieurs milliers, s'attaquent aux habitations, désertées ou non. On entend des tirs, soit sur des habitants, soit entre les pillards et les policiers qui essaient d'intervenir.
2 janvier matin : les groupes électrogènes des hôpitaux et des pompiers arrivent en fin de réserve. Des camions sont envoyés d'urgence refaire le plein à Donges, aucune station service ne fonctionnant sur Nantes.
2 janvier après-midi : 2.000 militaires arrivent sur zone, ainsi que des renforts de la Gendarmerie. L'armée commence à quadriller le centre-ville. Avec des haut-parleurs, elle prévient que le couvre-feu est instauré, qu'il est interdit de sortir de chez soi.
Affolés, quantité de nantais cherchent à quitter la ville par n'importe quel moyen. Les militaires en règle générale s'abstiennent de tirer.
Nuit du 2 au 3 janvier : toujours le noir total. 4.000 militaires arrivent en renfort. Ils tirent au jugé sur tout ce qui bouge. On dénombrera une vingtaine de morts, pour moitié des pillards, pour moitié des fuyards.
3 janvier : Ville morte. Toujours le black-out. Les militaires tiennent la ville, une cinquantaine de véhicules blindés (VAB ou CRS) sillonnent les rues, ainsi que les camions de pompiers. Peu de pillages, mais quelques incendies spectaculaires, comme le centre commercial Atlantis et la gare SNCF. Les habitants qui ont besoin d'aide (eau, nourriture, soins) agitent un drapeau blanc en direction des militaires ou des pompiers.
4 janvier matin : le manque d'eau est devenu dramatique. Les pompiers installent des cuves, des abreuvoirs, où la population vient s'approvisionner. Après quelques bousculades meurtrières, les militaires régulent les opérations.
4 janvier après-midi : 4 lignes RTE sur les 10 sont rétablies. L'électricité est de retour sur la quasi-totalité de la ville. L'eau également. Le gouvernement donne quelques consignes à la télévision. Les premiers réfugiés commencent à rentrer, et constatent l'étendue des dégâts.
4 janvier, 22h00 : dernier briefing avec l'action. Avec son accent suédois à couper au couteau, Tobias refait son petit speech bien senti sur la sobriété énergétique, la convergence des luttes, et ces salauds de bourgeois toulousains, qui vont s'en prendre plein la gueule !